Parachat Balak – Bilham, le prophète des nations

 

 

Bilham, le prophète des nations, avait prononcé une prière à Hachem: «Que ma mort soit la même que celle des justes d’Israël et que ma fin ressemble à celle du peuple juif.»

On peut s’interroger sur ce désir soudain de mourir comme un ben Israël alors que toute sa vie représenta justement l’antithèse des valeurs d’un homme qui respecte les injonctions de la Torah ?

En effet, l’existence d’un juif avec son lot d’obligations, de contraintes, d’exigence de rigueur et de maîtrise de soi ne fait pas forcément pâlir de jalousie ceux qui en sont exclus. Par contre, on promet à celui qui quitte ce monde un salaire, de récompenses, la plénitude d’une vie éternelle au paradis. Une telle perspective attire évidemment juifs comme non-juifs.

Mais voilà que la Paracha nous raconte que Bilham Ben Behor fut tué par le glaive!

A ce propos, le Ben Ich Hai, Rav Yossef Haim de Bagdad s’interroge sur la nécessité de ce récit. Pourquoi le texte prend – il soin de raconter la fin de Biham, d’autant plus qu’elle ne correspond pas à sa prière ? Et pour quelle raison ne pas l’avoir exaucée ? Cela paraît contradictoire avec le fait qu’une Paracha entière lui soit consacrée et porte son nom.

Le Ben Ich Hai répond à cette interrogation en rapportant une histoire éloquente tirée de ses fameuses paraboles.

Un homme, peu versé dans la connaissance des lois, avait pour habitude d’arriver à la synagogue le matin à une heure tardive. Du jour où il rencontra son épouse, une femme pieuse et érudite en Torah, il s’est vu dans l’obligation de faire des efforts à ce sujet et parvint à avancer l’heure de son arrivée à l’office du matin.

Il fut bien vite récompensé de ses progrès. Lorsqu’il arriva un jour de bonne heure pour prier, toute l’assemblée se leva. Notre homme ravi s’étonna tout de même d’un tel accueil de la part de personnes qui le connaissaient à peine. Il aperçut alors un imposant siège de président. « Puisqu’ils le désirent, voilà comment leur permettre de m’honorer dans les règles de l’art », se dit-il.

Dès qu’il s’assit, tous les fidèles firent de même. Ce témoignage d’importance dépassa toutes ses espérances. Cependant, quelques minutes plus tard, le bedeau de la synagogue vint lui dire à l’oreille que le président arriverait d’un moment à l’autre et qu’il lui fallait changer de place pour rejoindre celle des invités. Il s’exécuta et prit place au fond de la salle. Il constata pourtant que les honneurs que l’on réserva au président n’atteignirent pas l’ampleur de ceux qu’on lui avait témoignés. Pour ce dernier, certains se levèrent, d’autres pas, tantôt lui faisant signe de la main, parfois non…

Il est tout de même curieux qu’il ait reçu un accueil bien plus élogieux que le président lui-même !

A la fin de la prière, il rentra chez lui fier et enchanté et raconta à son épouse son expérience réjouissante. Elle lui demanda alors : « lorsque tu t’es relevé pour t’asseoir au fond de la salle, en ont-ils tous fait autant ? Il répondit négativement.

« Il me semble en fait que tu t’es trompé et qu’ils ne se sont pas levés pour toi, pas même la première fois. Du dénouement on peut souvent comprendre le commencement. Cela nous révèle que lorsque tu es entré, c’était le moment de Hachem mélèkh, prière adressée à D. et que l’on récite debout.

Le Ben Ich Hai tente de nous apprendre grâce à cette parabole que si Bilham avait pu penser que cette révélation prophétique lui avait été faite grâce à des qualités personnelles, il n’en n’était rien. Ainsi nous comprenons les raisons d’une telle insistance du passouk, du verset, sur sa mort. Elle vient en fait nous éclairer sur toute sa vie.

Nos sages expliquent que l’unique raison pour laquelle Bilham a mérité une révélation d’Hachem était pour que les nations du monde n’aient pas le prétexte d’invoquer le fait qu’eux n’ont pas eu de prophète. On pourra dans ce cas leur répondre : « Vous avez eu un prophète mais regardez ce qu’il a fait! » Lorsque Bilham ne s’est pas vu exaucer son vœu et sa prière de mourir comme un juif, c’était pour révéler que si sa fin fut si atroce, c’est parce que même au début lorsqu’il portait la parole de D., il ne le faisait pas pour glorifier Son Nom mais pour ses propres honneurs.

Cette histoire illustre l’idée que l’on ne peut prétendre aux avantages de mourir comme un juif si au préalable nous n’avons pas fait les efforts nécessaires pour vivre selon les principes du judaïsme.

 

 

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