Paracha Vayigach – Restez vous-mêmes !

 

Lorsque Yossef se dévoile à ses frères, il leur dit : «Je suis Yossef votre frère, celui que vous avez vendu en Égypte.»

Et les commentateurs expliquent : «Je suis resté exactement le même homme, malgré les titres qui sont les miens aujourd’hui, malgré mes fonctions de vice-roi d’Égypte.»

Une histoire vécue par Rabbi Akiba, et rapportée par le Midrach, vient étayer cette idée. Rabbi Akiba devait vendre une pierre précieuse de grande valeur, et pour cela, il se rendit au marché. En chemin, il rencontra un homme très pauvre, habillé en haillons, à l’allure négligée, et qui faisait partie des fidèles de la synagogue des pauvres.

Cet homme s’approcha de Rabbi Akiba et lui demanda quel était le but de son déplacement. Et devant la réponse de Rabbi Akiba, ce miséreux souhaita acquérir cette pierre précieuse !

– Venez avec moi, lui dit ce pauvre. Nous allons nous rendre à mon domicile et là-bas, je vous paierai, au prix fort, la pierre précieuse que vous vendez. Rabbi Akiba fut un peu surpris : « Cet homme-là n’aura jamais les moyens d’acheter une pierre pareille, elle vaut une fortune… », pensa-t-il.

Mais ne voulant pas le blesser, il le suivit avec beaucoup d’égards. A sa grande stupéfaction, lorsqu’ils arrivèrent devant la maison de cet homme, ce furent des domestiques qui les accueillirent et les firent asseoir. Ils les installèrent sur des sièges d’or antique, et les servirent.

– Donnez donc à Rabbi Akiba tout l’argent qui lui revient pour cette pierre précieuse, ordonna l’homme à ses serviteurs. Et que l’on dresse la table s’il vous plaît. Rabbi Akiba comprit alors que l’homme qui se trouvait en face de lui n’était pas un pauvre, loin de là. Il possédait une fortune immense.

A la fin du repas, Rabbi Akiba ne put s’empêcher de le questionner :

– Cher Monsieur, vous qui êtes à la tête d’une si grande richesse, pourquoi vous habillez-vous en haillons ? Pourquoi priez-vous parmi les pauvres, parmi ceux qui n’ont rien ?

– Rabbi, mon maître, répondit notre homme. Il est écrit que l’homme n’est sur terre que de passage. Je sais bien que l’argent n’est pas le mien, et que du jour au lendemain, je pourrais le perdre. Me tenir parmi les pauvres est bénéfique pour moi. Grâce à cette habitude, je ne vais pas m’enorgueillir de ce que le Tout-Puissant m’a donné. Ainsi, je garde à l’esprit que tout vient de D.ieu. Si je fréquentais des riches, je risquerais presque sans aucun doute de tomber dans l’orgueil, et D.ieu ne supporte pas les orgueilleux.

Rabbi Akiba fut bien sûr émerveillé des qualités morales de cet homme, de son intelligence et de sa simplicité. Avant de le quitter, il le bénit chaleureusement.

Plus pauvre que les pauvres !

La richesse est un moyen de s’accomplir et d’accomplir les commandements divins (mitsvoth). Pour le ‘Hafets ‘Haïm, il existe une plus grande épreuve que la pauvreté : c’est la richesse ! En effet, le pauvre sait que le peu qu’il reçoit, il le reçoit directement de D.ieu. Et quand on n’a pas d’argent, on a l’opportunité d’investir dans d’autres valeurs.

La richesse, toute attirante qu’elle soit, promet le bonheur, mais elle n’en reste pas moins un danger terrible : elle laisse penser, à celui qui s’est enrichi, qu’il a des qualités particulières qui lui permettent d’avoir accès à cet argent. Mais en réalité, l’argent, en dehors des avantages relatifs et éphémères qu’il représente, ne vaut que par l’accès au spirituel qu’il permet : lorsqu’on a de l’argent, on peut accomplir les commandements divins de la plus belle façon (béhidour)…

Mais si la richesse me fait m’enorgueillir, je me retrouve plus pauvre que les pauvres eux-mêmes, puisque j’ai tout perdu sur le plan spirituel.

Malgré ses titres de noblesse, malgré sa puissance, alors qu’il était devenu vice-roi d’Égypte, Yossef sut rester simple, rester le même homme qu’il fut jadis, celui qui s’occupait humblement des troupeaux de son père.

De cette histoire du Midrach, nous apprenons une leçon simple et vraie : Quand on débute dans la vie, où lorsque l’on connaît des difficultés professionnelles ou financières, on a tendance à rester humble, à comprendre les difficultés des autres, et à chercher à les aider : on développe des valeurs profondes.

Quand soudain, on accède à un certain rang, à une certaine reconnaissance sociale, à un certain niveau financier, la tendance va plutôt vers le fait de chercher un cercle d’amis à «sa hauteur » : des gens influents, importants, des gens qui ont réussi et qu’il est gratifiant de fréquenter et l’on oublie ses vrais amis.

Lorsqu’on a accédé à un niveau social et financier plus élevé que par le passé, il est important de rester intégré dans un milieu qui préserve les valeurs d’humilités et les qualités morales, qui sont la vraie richesse, et qui sont le but de notre existence.

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